dimanche 10 mai 2009

Insultes à l'hsitoire

Après la parution de Comment Nicolas Sarkozy écrit l’histoire de France. Dictionnaire critique[1] , il nous semble aujourd’hui indispensable de revenir, en mai 2009, sur certains mots et événements historiques utilisés et instrumentalisés sans vergogne, depuis quelques mois, en les détournant de leur sens et de leur réalité historique.

- les États généraux : les derniers en date ont été lancés en avril 2009 par la Conférence des directeurs d’IUFM (CDIUFM) à propos des projets de réformes gouvernementales sur la formation des enseignants (en fait la liquidation de toute formation professionnelle sous le vocable de « mastérisation »). La modalité de la « tenue » de ces « États généraux » est précisée : une consultation sur Internet en direction des étudiant.e.s, des stagiaires, des personnels en IUFM, consultation « modérée » par un groupe composé de personnels de direction des IUFM et de webmaster (ce qui signifie choix des questions retenues par un petit groupe « d’experts » auto-désignés) en fonction des questions posées ou des réflexions apportées.
Faut-il rappeler que les États généraux étaient, sous l’Ancien Régime, une assemblée des représentants des trois ordres - clergé, noblesse et Tiers État -, élus et réunis à la demande du Roi ; les derniers et les plus célèbres se tinrent à Versailles en mai 1789 ; le dernier représentant de la monarchie absolue, Louis XVI, fut contraint de saluer tous les députés et ensuite de les laisser discuter entre eux sur les revendications transmises dans les Cahiers de doléances rédigés par des assemblées dans le cadre des villages, des quartiers ou des baillages. Ces états généraux aboutirent la nuit du 4 août à la suppression des privilèges. Les « États généraux » de la CDIUFM ne sont donc qu’une pâle copie de très mauvaise qualité de cette assemblée d’Ancien Régime pourtant bien inégalitaire. Le premier combat en 1789 fut d’obtenir que chaque député compte de façon égale – un homme, une voix - et non deux voix pour les deux ordres privilégiés et une voix pour le Tiers État. Mesdames et messieurs les directeurs d’IUFM vous êtes aujourd’hui bien en deçà des décisions du dernier souverain absolu du royaume de France. Revendiquons pour ce que vous appelez États généraux, un homme ou une femme = une voix ! Et rédigeons partout nos Cahiers de doléances dans des assemblées locales où, là aussi, un homme ou une femme = une voix ! A cette seule condition pourra être utilisé le nom d’États généraux, sinon nous porterons plainte pour abus d’identité.

- Grenelle de l’environnement, des ondes, de la mer etc. etc. …..Faut-il rappeler que l’origine de l’utilisation du mot Grenelle vient de la négociation ouverte le 25 mai 1968, à l’initiative du Premier ministre Georges Pompidou, avec les représentants des syndicats et des patrons, dans un contexte de grève généralisée, la réunion se tenant dans les locaux du ministère du Travail, rue de Grenelle. Faut-il rappeler que la négociation s’est conclue au petit matin du 27 mai par un protocole d’accord sur lequel tout le monde sembla alors s’accorder (voir sur INA.fr les déclarations, le 27 mai 1968 à 7H30, sur le perron du ministère du secrétaire de la CGT Georges Séguy : « la reprise du travail ne saurait tarder ») et aussi le refus quelques heures plus tard des salariés de Renault, suivis par de nombreux autres, d’entériner ce protocole d’accord. Faut-il rappeler qu’il n’y eut donc pas d’accord à Grenelle contrairement à une légende tenace et qu’il s’agit en fait d’un échec de la négociation tripartite et de la cogestion de la crise par le gouvernement et les organisations syndicales représentatives. Du fait de cette usurpation d’identité, souhaitons donc aux différents « Grenelle » le même sort que leur illustre prédécesseur !
[1] Agone, avril 2008, voir sommaire

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